Le 14 mars 2024, l’Assemblée nationale adoptait à l’unanimité une loi ambitieuse contre la fast-fashion, portée par la députée Anne-Cécile Violland (Horizons). Soutenue par le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu, cette proposition visait à réduire l’impact environnemental de la fast fashion. Pourtant, malgré l’urgence, la loi est aujourd’hui bloquée au Sénat. Pourquoi ce retard ? Qui en est responsable ?

Un Blocage Inexpliqué au Sénat

Adoptée par l’Assemblée nationale, la loi devait ensuite être examinée par le Sénat. Pourtant, malgré de nombreuses démarches, le texte est resté bloqué. Là où tous les acteurs rencontrés, tous bords politiques confondus, reconnaissent pourtant l’urgence. En un an, les achats sur les plateformes chinoises comme Shein et Temu ont bondi de 200 %.

La sénatrice de l’Oise Sylvie Valente-Le Hir (Les Républicains), nommée rapporteuse en avril 2024 est également dans le flou « Rien ne justifie ce revirement du gouvernement ». Maud Sarda, co-fondatrice de Label Emmaüs décide de lancer un appel sur Linkedin…. puis un deuxième.

Maud Sarda tenant deux pancartes appelant à trouver des soutiens au Sénat pour la loi anti-fast fashion.

Ce n’est qu’après un effort collectif et des pressions que Jean-François Longeot, président de la commission Aménagement du territoire et Développement durable, nous annonçait enfin un vote prévu pour le 26 mars 2025.

Maud Sarda annonçant le vote de la loi anti-fast fashion au Sénat le 26 mars.

Lobbying Intensif : Shein en Première Ligne

Cependant, coup de théâtre le 1er février : la loi est brutalement retirée de l’agenda du Sénat par Matignon. Un revirement qui interroge sur les raisons d’un tel ajournement.

Maud Sarda dénonçant l’annulation du vote de la loi anti-fast fashion au Sénat sur décision gouvernementale.

Ce revirement soulève des questions sur l’influence croissante des géants de la fast-fashion, notamment Shein, désormais première enseigne de mode en ligne en France, devant Vinted.  Suite au vote de l’Assemblée nationale, Shein a contacté plusieurs députés stratégiques de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire pour les rencontrer.

Le 20 décembre 2024, l’entreprise a annoncé le recrutement de personnalités influentes, notamment l’ex-ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, dans un comité de conseil régional. D’autres figures politiques ont rejoint Shein récemment, telles que :

  • Nicole Guedj (ancienne secrétaire d’État et conseillère d’État)
  • Bernard Spitz (haut fonctionnaire ayant rencontré la présidente de l’Assemblée nationale en janvier 2025)
  • Gunther Oettinger recruté via son cabinet de conseil (ancien commissaire européen)

Rien qu’au deuxième trimestre 2023, Shein a dépensé 600 000 dollars pour des activités de lobbying aux États-Unis.

Une Structure Juridique Complexe pour Échapper aux Régulations

Shein ne se contente pas de lobbying actif : son modèle économique repose sur une ingénierie juridique et fiscale sophistiquée. Par exemple, son fondateur Chris Xu est devenu résident permanent de Singapour, permettant à l’entreprise de ne plus dépendre de l’approbation chinoise pour une éventuelle introduction en bourse. 

En Europe, la firme s’appuie sur le système fiscal irlandais, réputé pour ses avantages, et bénéficie du cadre juridique européen qui empêche d’interdire la publicité des marketplaces.

Egalement, en se transformant en marketplace ouverte, Shein se place sous la législation européenne du e-commerce, rendant son encadrement encore plus complexe, et empêchant de freiner ses actions de promotion et de publicité par des outils législatifs actuels.

Quelle Suite pour la Loi Anti-Fast Fashion ?

Malgré ces manœuvres, l’opinion publique et de nombreux élus restent mobilisés. La fast fashion représente un défi environnemental majeur, et les plateformes comme Shein et Temu continuent de croître à un rythme alarmant.

L’avenir de la loi anti-fast fashion repose désormais sur la pression exercée sur le gouvernement et le Sénat. Convaincre, François Bayrou, Gérard Larcher et les sénateurs de la nécessité urgente de ce texte est plus que jamais essentiel.

L’heure tourne : la fast fashion continue de proliférer, et chaque jour sans régulation aggrave son impact environnemental et social. Reste à voir si les intérêts écologiques et éthiques l’emporteront sur le poids des lobbys.

Le 14 mars dernier, à l’occasion du premier anniversaire du vote de la loi anti fast-fashion à l’Assemblée nationale, une mobilisation nationale d’ampleur a eu lieu, portée par la coalition Stop Fast-Fashion.

Mobilisation : 10 tonnes de vêtements déversées devant le Sénat pour appeler au vote de la loi anti-fast fashion.

Cinq jours avant la réunion de la Conférence des Présidents au Sénat, cette action visait à mettre la pression sur les sénateurs pour obtenir enfin une date officielle d’examen de la loi. L’inaction n’est plus une option : un cadre législatif est indispensable pour contrôler et limiter l’impact des géants de l’ultra fast-fashion comme Shein et Temu.

François Bayrou, Gérard Larcher, quand vous déciderez-vous à vous attaquer véritablement à la fast-fashion ? 

Aidez-nous à interpeller François Bayrou sur https://stopfastfashion.fr

#StopFastFashion

Sources : 

CM-CM. « Lobbying de Shein : des députés dénoncent des pressions sur la loi anti fast-fashion au Sénat. »

Fashion Network. « Shein s’adjuge l’ancien ministre de l’Intérieur Christophe Castaner comme nouvel atout de son jeu de lobbying. »

Stop Fast Fashion. « Stop Fast Fashion – Mobilisation contre l’ultra fast fashion. »

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